Qui dit statut social élevé, dit vaisselle de table de
qualité. Pour le projet qui est le mien, je ne pouvais me contenter d’un
gobelet en bois tourné, comme en voit souvent en reconstitution.
Il me fallait donc trouver une source de verre à boire datée
de la fin du XIIe siècle ou du premier quart du siècle suivant, et de
préférence issue de l’espace provençale, dans un souci de cohérence
géographique des sources.
Bien entendu, je me penchais en priorité sur le matériel
issu des fouilles du castrum de Rougiers, dans le Var. Ce site, dont l’occupation
démarre dans le dernier quart du XIIe siècle, a fourni une grande quantité de
mobilier, spécialement en ce qui concerne le verre, des ateliers de verriers
étant présent au sein du castrum à une période plus tardive que celle qui nous
intéresse ici.
La forme la plus répandue à Rougiers pour la période fin
XIIe-première moitié XIIIe siècle est celle du verre bitronconique, plus
précisément la forme A3 selon la classification établie par Danièle Foy.
Ces verres sont caractérisés par une teinte vert-jaunâtre,
et la présence de fondant potassique
incluant un faible pourcentage de sodium.
Un descriptif assez détaillé de la méthode de fabrication de
ces verres se trouve dans un article de cette dernière paru dans le n°5 de la
revue Archéologie Médiévale (1975), accompagné d’un dessin technique de ce type
de verre. Le profil donné est celui d’un verre d’environ 11 cm de haut, avec
une ouverture de 7 cm.
Une fois les informations techniques recueillies, il fallu
trouver un artisan susceptible de réaliser cette reproduction. Parmi ceux
auxquels j’avais soumis ce projet, François Dubois et Chloé Grevaz (« Les
Infondus ») furent les plus réactifs et les plus intéressés par le projet.
Moins d’un mois après les avoir contactés, je recevais le verre, accompagné d’une
autre reproduction destinée au Musée Itinérant.
Leur réalisation est d’une très grande qualité, les côtes de
l’original ainsi que sa teinte sont respectées, et la finesse de l’ensemble
rend justice à la verrerie médiévale, hélas méconnue.
Copie d'un verre bitronconique forme A3, par Chloé Grevaz et François Dubois.
Bibliographie :
Démians d’Archimbaud Gabrielle, Les fouilles de
Rougiers : Contribution à l'archéologie de l'habitat rural médiéval en
pays méditerranéen, éditions du C.N.R.S., 1981 ; rééd. 2010.
Foy Danièle, « L’artisanat du verre creux en Provence
Médiévale », Archéologie Médiévale,
5 ,CRAHM, Caen, 1975, p.104-138.
Foy Danièle, Le verre médiéval et son
artisanat en France méditerranéenne, ed. du C.N.R.S., 1988, 467
pages.